Pourquoi me suis-je opposé à la proposition de Bruno Retailleau d’imposer une quatrième année d’internat dans les déserts médicaux. 

La proposition de loi de Bruno Retailleau (LR) adoptée par le Sénat entérine une quatrième année d’internat pour les généralistes, laquelle serait effectuée « en priorité dans des zones où la démographie médicale est sous‑dense », selon le projet de loi. Je me suis opposé à ce projet de loi, pourquoi ? 

Une mesure injuste

Les étudiants en première année d’internat sont, depuis le Segur de la Santé en 2020, rémunérés au SMIC horaire qui s’élève à 1 645,48 euros, soit 1 302,64 euros net mensuels. Certains avancent depuis toujours que leurs études ayant été prises en charge par l’État, il serait cohérent de les contraindre pour une période donnée à s’installer dans des territoires de façon obligatoire. Mais cet argument ne prend donc pas en compte la faible rémunération des internes qui sont venus palier la pénurie dans les hôpitaux publics. Au final, cette obligation s’apparente à un service national. 

Une mesure contreproductive pour l’hôpital public

La proposition de loi consiste à déshabiller Pierre pour habiller Paul. En effet, les étudiants en quatrième année d’internat ne seront par définition pas en capacité de s’installer en libéral et constitueront un manque sur le marché des généralistes.

Une mesure répressive 

Cette quatrième année d’internat avec obligation d’exercer dans les zones sous-dense constitue une première étape dans la violation de la liberté d’installation des médecins. 

Une mesure à court-terme et dangereuse pour les communes

Tout comme l’obligation d’installation, cette loi ne garantit en rien la pérennité de l’offre en médecins généralistes et prend le risque d’alourdir les charges des communes qui devront répondre aux exigences d’un cabinet médical adapté sans aucune garantie de continuité. Cette loi mise sur une volonté de ces internes de s’installer en zones sous-dense et notamment rurales. Mais combien seront-ils ? Combien seront en mesure d’assurer à leurs conjoints, leurs enfants, les conditions nécessaires d’une vie de famille et professionnelle à long terme ?

Une mesure sans préparation.

Quelles seront les conditions d’affectation des internes en médecine et de quelle façon se fera le choix de leurs destinations ? Cette loi n’y répond pas. De ce fait, aucune prise en compte des impératifs familiaux, personnels, ou du choix n’est encore évaluée. Quel seront alors les effets à long terme d’étudiants en médecine qui seront propulsés dans des zones rurales qu’ils ne connaissent pas ? 

Une mesure qui ne répond pas à la pénurie
Affectés au sein d’un cabinet médical sous tutorat d’un médecin référent, les interne en quatrième année de médecine viendront donc renforcer des cabinets existants. Le bénéfice pour les communes sans généraliste est donc nul et ne répond pas à la proximité de soins que réclament les Français. D’autre part, les grandes métropoles, comme la Seine-Saint-Denis, sont aussi sous-dotées en médecins généralistes au prorata du nombre d’habitants. Enfin, cette quatrième année d’internat risque de rendre encore moins attractive la médecine générale  au profit des spécialités médicales. 

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