J’ai alerté le Premier ministre sur le risque de voir les collectivités locales évincées par un projet d’ordonnance portant transposition d’une directive européenne concernant les règles communes pour le marché intérieur de l’électricité. Voici le texte de la question écrite transmise à Matignon.
« M. Alain Houpert attire l’attention de M. le Premier ministre sur les risques d’éviction des collectivités et groupements de collectivités, propriétaires de réseaux de distribution d’électricité – soit qu’ils exploitent actuellement en régie soit qu’ils en concèdent l’exploitation à ENEDIS ou à une entreprise locale de distribution -, que fait peser sur eux le projet d’ordonnance portant transposition de la directive (UE) 2019/944 concernant les règles communes pour le marché intérieur de l’électricité. En effet, le III de l’article 11 prévoit seulement que « le gestionnaire de réseau de distribution d’électricité (GRD) publie au moins tous les deux ans et soumet à l’autorité de régulation un plan de développement de réseau transparent », ce plan énonçant les investissements programmés pour les cinq à dix prochaines années. En l’état, ce texte, en faisant l’impasse sur les collectivités et groupements de collectivités, méconnaît le cadre juridique actuel en cours de déploiement sur tout le territoire, qui résulte d’une contractualisation des autorités concédantes représentées par la fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCRR) avec ENEDIS, adoptée en décembre 2017. Ce modèle de contrat de concession, liant les parties sur des périodes longues (de trente ans), donne une place centrale à la gouvernance des investissements souhaitée par les acteurs locaux, avec de nouveaux schémas directeurs et programmes pluriannuels d’investissement co-construits entre l’autorité concédante et ENEDIS. Or le projet d’ordonnance , qui prévoit bien que le gestionnaire de réseau d’électricité « consulte les utilisateurs du réseau concerné », ne s’applique pas aux AODE, autorités organisatrices de la distribution d’électricité, qui, propriétaires des réseaux qu’ils exploitent, ne peuvent être assimilées à de simples « utilisateurs de réseaux ». Exclues de la gouvernance des investissements de distribution d’électricité, les AODE n’auraient plus la possibilité de faire valoir, face au gestionnaire de réseau de distribution et face à la Commission de régulation de l’énergie, l’approche des élus locaux, soucieux de développement territorial, d’emploi local, d’aménagement du territoire et de mobilisation en faveur de la transition énergétique, ce qui augure d’un grave conflit de légitimité. C’est pourquoi il lui demande de revoir substantiellement le projet d’ordonnance en redonnant aux AODE la place essentielle qu’elles doivent occuper. Il le remercie de sa réponse. »
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